Pour nous, la formation politique est la garantie de pouvoir élever le niveau de conscience de toutes et tous, de distribuer les connaissances, donc le pouvoir, pour garantir la construction d'une organisation vraiment démocratique.
« Je vais vous donner à peu près le même genre de travail (…) mais je veux que vous changiez de méthode, que vous ne suiviez plus votre propre méthode, mais celle que je vous ai préparée et qui figure sur cette fiche d’instruction ».
L’Affaire de l’esclave Furcy, Mohammed Aïssaoui, Gallimard, 198 pages - 16, 90 euros
Si Furcy, né en 1786, était encore vivant en 1848 quand parut le décret d’abolition complète de l’esclavage dans les colonies françaises dû à Victor Schœlcher, il l’aurait applaudi, quoique moins concerné depuis un jugement de 1843 qui le reconnaissait « né en état de liberté ». Il en avait apporté la preuve dès 1817 auprès du tribunal de Saint-Denis de la Réunion, mais ce fut pour des décennies de tergiversations des juges et surtout d’acharnement de ses prétendus « maîtres » après qu’il les eut assignés en justice. La revendication de sa liberté par ce « Malabar, mulâtre, né à Bourbon, maître d’hôtel, jardinier et maçon, estimé à 7 000 francs » n’allait-elle pas servir d’exemple aux 16 000 esclaves en situation similaire, puis aux 60 000 autres qu’employaient les puissants planteurs de l’île ? Emprisonné plus d’un an puis transféré par mesure punitive dans une plantation de l’île Maurice, Furcy n’échappa aux vexations de ses « maîtres » qu’à la faveur d’une décision des autorités mauriciennes jugeant en 1829 qu’il n’avait pas été dûment déclaré « comme marchandise » lors de son arrivée dans l’île ! Ces faits ont été tirés de l’oubli en 2005, avec l’achat par les Archives départementales de la Réunion de documents mis en vente publique par les héritiers de l’un des courageux défenseurs de Furcy. Alerté par quelques entrefilets dans la presse, Mohammed Aïssaoui, journaliste au Figaro littéraire, entreprit alors une enquête dont il publie aujourd’hui le résultat, sous forme de « récit » et non d’étude savante, parce que « l’histoire de l’esclavage est une histoire sans archives », comme il l’écrit après Hubert Gerbeau, spécialiste du sujet. Son récit bien mené donne chair à ces vieux documents, en laissant aux lecteurs le soin de poursuivre l’enquête sur ce sujet accablant.